14/01/2016

Le poème runique Anglo-Saxon (750-950)


Le poème runique Anglo-Saxon, rédigé en vieil anglais, est le plus ancien, et il établit une liste de 29 runes du futhorc (qui en a contenu jusque 33). Il est difficile à dater précisément, mais il aurait été rédigé entre la fin du VIIIème siècle et le début du Xème siècle. Cela correspond à l’époque de la christianisation, ce qui se reflète particulièrement dans les strophes du poème dont sont totalement absentes les références païennes. De plus, le manuscrit original, conservé à la bibliothèque Cotton (Otho B.x, fol. 165a - 165b) fut perdu lors d’un incendie en 1731. Cependant, Humfrey Wanley (1672-1726) en avait fait une copie, publiée en 1705 dans le Linguarum veterum septentrionalium thesaurus de l’historien George Hickes.


Mais il semble que cette copie ne soit pas fidèle à l’originale. En effet Hickes a recopié le poème en prose, l’a divisé en 29 strophes et a ajouté les runes en face de chacune d’entre-elles. Car le texte ne semblait pas, initialement, contenir le nom des runes, celles-ci constituant plutôt la réponse à l’énigme posée par la strophe (ce qui devait être aussi le cas des autres poèmes runiques). De plus, Hickes donne des variantes pour cinq runes (wenne, hægl, nyd, eoh, et ing) et quatre runes (cweorð, kalc, stan et gar) figurant en bas de pages ne font pas partie du poème.


f
Feoh (Argent)
L’argent est un confort pour tous ;
cependant chacun doit beaucoup partager
s’il veut être approuvé par le Seigneur. 


u
Úr (Aurochs)
L’aurochs est résolu, il a de puissantes cornes ;
une bête féroce luttant avec ses cornes,
fameux coureur de landes, c’est un combattant.


th
ðorn (Epine)
L’épine est extrêmement piquante ;
pour les nobles, la saisir est un tourment ;
excessivement cruelle pour quiconque s’étend sur elle. 


o
Os (Bouche)
La bouche est source de tout langage,
soutien de la sagesse et confort du sage,
elle est la joie et la source de confiance de tout noble.


r
Rad (Chevauchée)
Chevaucher pour quiconque semble aisé,
lorsqu'on est à l'abri, mais plus difficile pour celui
qui parcourt une longue route sur un puissant destrier.


c
Cén  (Torche)
La torche est perçue par chaque être comme
une flamme brillante et lumineuse ;
le plus souvent elle brûle dans la demeure
où les nobles se reposent.


g
Gyfu (Don)
Le don est pour les humains une louange
et une parure, un soutien et une approbation ;
il apporte aux sans logis aide et honneur, quand ils en sont dépourvus.


w
Wenne (Joie)
La joie s'obtient quand on a peu de griefs,
qu'il s'agisse de blessures ou de tristesse et que l'on a
pour soi prospérité, plaisirs et quantité de réserves.


h
Hægl (Grêlon)
Le grêlon est le plus blanc des grains,
enrobé de vapeurs célestes ;
porté par des bourrasques de vent,
il se transforme ensuite en eau.


n
Nyd (Epreuve)
L'épreuve est grandement décourageante ;
souvent chez les enfants des humains,
elle est de quelques aides et soins, s'ils s'en préoccupent à temps.


i
Ís (Glace)
La glace est très froide et extrêmement glissante ;
elle est scintillante, brillante comme le verre, ressemble à des gemmes ;
le sol couvert de givre semble beau à contempler !


j
Gér (La période sans givre - l'Eté)
L’été est l'espoir des humains
que Dieu, roi des cieux, fasse sortir de la terre
une végétation comestible aux couleurs éclatantes
pour les nobles et les nécessiteux.


z
Eoh (If)
L'if est à l'extérieur doté d'une écorce rugueuse,
fort, sûr dans le sol, pourvoyeur du feu,
arbre bien enraciné, heureux dans son foyer.


p
Peorð (Coupe à Dés)
Le gobelet à dés apporte toujours jeu et rire
aux hommes fiers, là où s'assoient les guerriers
joyeusement rassemblés dans les tavernes. 


x
Eolhx-secg (Laiche de l'Elan)
La laiche de l'élan a sa terre le plus souvent dans les marais ; 

poussant dans l'eau, blessant sévèrement,
brûlant au sang quiconque tenterait de s'en saisir. 


s
Sigel (Soleil)
Le soleil pour les navigateurs est espoir incessant
tandis qu'ils voguent sur le bain des poissons,
jusqu'à ce que leur destrier des vagues les ramènent au port.


t
Tir (Tyr)
Tyr est signe de gage ; il garde bien le serment du noble ;
progressant toujours au-dessus des nimbes de la nuit,
et ne disparaissant jamais.


b
Beorc (Bouleau)
Le bouleau n'a pas de fruits. Il soutient néanmoins
ses jeunes pousses sans graines ; de belle envergure,
son sommet se dresse, glorieusement orné
d'un feuillage croissant, il touche les cieux.


e
Eh (Cheval)
Le cheval est pour les dirigeants, la joie des nobles.
Le cheval est fier quand les lanciers l'entourent,
les riches le montent, se rassemblent pour en parler ;
il est toujours un réconfort pour les inquiets.


m
Man (Homme)
L'homme, lorsqu'il est joyeux, est cher à ses amis ;
pourtant il doit abandonner ses compagnons
car le seigneur a établi les lois de Dieu
que cette humble chair doive retourner à la terre.


l
Lagu (Eau)
L'eau pour les gens semble immense
s'ils doivent la franchir sur des bateaux instables,
et que les vagues de la mer les effraient fortement,
et que le destrier des mers ignore la bride.


ng
Ing (Ing)
Chez les Danois de l'Est, Ing était d'abord
révéré parmi les guerriers, jusqu'aux confins de l'est,
par-delà les vagues, il prit la route, suivit de son char ;
Alors les Heardingas l'appelèrent le héros.


oe
Éþel (Foyer)
Le foyer est très cher au cœur de chaque humain
s'il peut y demeurer de droit, alors il est juste
que chez lui il puisse jouir de ses récoltes.


d
Dæg (Jour)
Le jour envoyé par le Seigneur est cher à l'humanité,
la merveilleuse lumière du créateur, joie et grand espoir
pour le pauvre et l'affluant ; tous en profitent.


a
Ác (Chêne)
Le chêne est sur Terre pour les enfants des humains,
fourrage pour le bétail, fréquemment il voyage
sur le bain des fous de Bassan,
les vagues révèlent si le chêne s'avère digne de confiance. 


ä
Æsc (Frêne)
Le frêne est extrêmement grand ; aimé des humains.
il est fermement enraciné et ne bouge pas
même s'il est attaqué par une multitude d'imbéciles. 


y
Ýr (Arc d'If)
L'arc d'if est pour les athlings et les jarls
joie et honneur : il est beau sur un cheval de guerre,
endure les expéditions difficiles,
c'est une bonne arme de guerre !


io
Íár (Serpent)
Le serpent est comme un poisson de rivière 

mais se nourrit toujours dans la forêt ; 
il a une belle demeure,
entourée d'eau où il savoure son existence.


ea
Éar (Tombe)
La tombe est terrible pour tout noble ;
de manière immuable la chair commence
à refroidir, à choisir la terre pâle comme compagne
de lit. Les fruits vont alors pourrir.
Les plaisirs vont alors disparaitre.
Les engagements seront alors rompus.